Des universitaires et des réfugiés

24 mars 2020|par Marc-André Veselovsky, SJ

Le 12 mars 2020, Norbert Piché, Directeur National, et moi-même nous nous sommes rendus à l’Université Bishop de Lennoxville (près de Sherbrooke) pour offrir notre atelier de simulation « Un Voyage en Exil ». Un groupe d’étudiants de l’Université qui parrainent des réfugiés depuis 1992 nous avait invités. Et non seulement parrainent-ils des réfugiés, ils leur donnent des bourses pour étudier à Bishop: les étudiants peuvent, en fait, devenir amis avec ces réfugiés puisqu’ils fréquentent la même école.

Ce comité d’étudiants organise régulièrement des événements de sensibilisation aux réfugiés: Une trentaine d’étudiants et de professeurs se sont présentés pour notre atelier. Nous nous sommes lancés dans l’exercice, en invitant les personnes à assumer l’identité de réfugié que nous leur avions fournie, à prendre des décisions comme on le ferait en exil, et à en subir les conséquences.

Après l’exercice, nous avons fait un débriefing avec tous les participants qui ont eu l’occasion de partager leur expérience. Beaucoup ont partagé leur colère, leur tristesse et leur frustration face au fait que tant de personnes (25,9 millions en 2018, pour être exact) doivent fuir leur maison, vivent dans des conditions désastreuses et reçoivent une aide disproportionnée de la part des populations et des gouvernements.

Dans notre groupe, un certain nombre de participants étaient en fait des réfugiés. Ils nous ont raconté des histoires terribles de souffrance, à ne pas savoir où travailler, où trouver de la nourriture, à qui faire confiance. Un des réfugiés avec nous, Hasan, nous a raconté qu’après avoir fui l’Irak pour vivre au Liban, il avait 11 emplois différents. Pour chaque emploi, il n’était même pas sûr que son employeur le paierait. L’employeur lui disait : « Nous allons te prendre pour une formation d’un mois sans salaire. Si votre travail nous plaît, nous vous embaucherons ». Souvent, ils ne l’embauchaient pas. Un employeur lui mettait même un pistolet sur la tempe pour s’assurer qu’il terminerait sa journée de travail. (L’histoire de Hasan: Youtube)

Le contraste entre la réalité d’être un réfugié et celle d’être un étudiant au Canada était frappant. Bien que de telles souffrances injustes se poursuivent dans de nombreux endroits du monde, les réfugiés qui ont été parrainés par le groupe d’étudiants construisent désormais un véritable avenir d’espoir. J’ai été impressionné par la générosité de ce groupe, l’honnêteté des anciens réfugiés dans leurs histoires, et la façon dont notre exercice a pu aider à déclencher nos conversations.

Espérons que d’autres groupes comme celui de l’Université Bishop se développeront. Des groupes qui effacent le stéréotype du réfugié et qui rencontrent simplement la personne qui fuit la violence là où elle se trouve. Nous devrions reconnaître le bien que des groupes comme celui-ci offrent aux personnes déplacées de force et aux Canadiens. J’ai reçu tant de choses rien qu’en écoutant pendant quelques minutes les histoires de ces personnes. Que pensez-vous que ces personnes offrent de plus aux étudiants qui sont leurs amis à Bishop? À l’avenir du Canada ?

Merci au Comité de parrainage des réfugiés de nous avoir invités à vous rencontrer et à partager ce que nous savons sur les difficultés d’être un réfugié. Travaillons à un avenir qui aide à considérer chacun comme une personne, et non comme un fardeau.