Entrevue avec nos donatrices : Les Filles de St-Paul
01 novembre 2025|Joanna Kozakiewicz
Les Filles de Saint-Paul est une congrégation religieuse catholique fondée en Italie en 1915 par le père Giacomo (Jacques) Alberione et Sœur Tecla Merlo. Le but des FSP est d’évangéliser par divers moyens de communication dont le livre, la radio, et l’Internet.
La congrégation est présente dans plus de 51 pays, dont le Canada. Au Québec, les sœurs sont surtout connues par leur maison d’édition, les Librairies Paulines et leurs insertions dans divers organismes de communications. Les sœurs collaborent avec différents organismes sociaux et religieux. La congrégation s’inscrit aussi sur la liste de nos donatrices et partisanes.
Sur leur site, nous pouvons lire la vision de leur fondateur :
« Le bienheureux Alberione voyait la Fille de Saint-Paul comme une femme consacrée, plongée dans la culture des communications, vouée à l’évangélisation et capable d’utiliser les langages d’aujourd’hui pour parler du Christ aux femmes et aux hommes de notre temps. »
Parmi les sœurs des FSP, Sœur Jeanne Lemire a accepté de répondre à quelques questions.
SJR Canada : Pourquoi les Filles de Saint-Paul s’impliquent-elles dans la cause des réfugiés, des migrants et des personnes déplacées de force ?
Sœur Jeanne Lemire, FSP :
Étant donné que nous avons grandi dans la congrégation à travers les exigences de la parole de Dieu, on ne peut pas faire autrement que de ne pas s’intéresser à la question des migrants.
Entre autres, nous sommes très centrés sur la parole de l’Évangile de Matthieu 25 :
« Ce que vous faites au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous le faites. »
Aussi, on se rend compte que de plus en plus de monde de notre société sont des gens qui sont vulnérables, que ce soient les migrants, les réfugiés. Puis, on dirait que nos gouvernements commencent à en avoir assez.
SJR Canada : Comment le soutien à la cause des réfugiés s’inscrit-il dans votre charisme ?
Sœur Jeanne Lemire, FSP :
Comme notre charisme s’exprime dans le monde de la communication de l’information, dans l’édition on n’a jamais hésité à publier et à faire connaître l’univers des migrants.
Que ce soit des exhortations apostoliques des derniers papes ou encore des écrits d’évêques, d’archevêques, ou des gens qui se sont impliqués pour venir en aide à la situation et essayer d’améliorer la situation des migrants ; c’est quelque chose qui nous intéresse toujours au premier plan.
SJR Canada : Quelle est la responsabilité d’une Fille de Saint-Paul envers les réfugiés ?
Sœur Jeanne Lemire, FSP :
On vient d’avoir un chapitre général [Une assemblée suprême de représentantes d’une congrégation religieuse, qui se réunit périodiquement pour discuter des affaires importantes et prendre des décisions pour l’avenir de l’ordre].
Dans les 12 dernières années, il y a eu une grande sensibilisation. Une fois l’assemblée générale terminée, nous retenons deux éléments que j’aimerais vous partager :
- « Entre autres le partage avec les laïcs qui doivent être de plus en plus des alliés dans notre mission. Dans un esprit de synodalité, ensemble religieuse et laïc nous désirons nous ouvrir à l’écoute et au dialogue avec tous, les pauvres, les personnes vulnérables, les jeunes, les professionnels, les migrants, les réfugiés… »
- Un autre élément qui est revenu, c’est accueillir les fragilités, d’abord les nôtres et celles des autres, c’est un don qu’on doit recevoir. « Nous entendons avec force le cri du monde migrant, réfugiés, victimes de conflits et de souffrances de la terre, ce sont des voix qui nous appellent à des réponses concrètes ».
Qu’est-ce qu’on va réussir à faire concrètement, c’est toujours difficile de se prononcer là-dessus, mais je reste convaincu qu’il y a des actions qui vont être posées qui sont durables et qui vont porter des fruits concrets.
SJR Canada : Quels changements aimeriez-vous voir dans le monde pour les réfugiés, les personnes déplacées de force et les migrants ?
Sœur Jeanne Lemire, FSP :
Il y a l’univers religieux et il y a l’univers politique, ça devrait marcher ensemble mais malheureusement ce n’est pas toujours le cas. Mais, je trouve que l’éveil est présent des deux côtés.
Quand on regarde l’univers politique, il y a des choses qui se font, mais je pense que ce n’est pas toujours une priorité. Quand les Nations Unies vont nous parler de situations qui sont urgentes, il y a des pays qui vont avoir une plus grande ouverture, mais je trouve qu’on est encore beaucoup au niveau de la rhétorique.
Les Nations Unies ou l’Unicef, et les grands organismes humanitaires internationaux nous informent, mais les changements concrets ne sont pas évidents. Ça reste une question qui est complexe.
Il y a de quoi d’épouvantable quand on voit les gens qui meurent noyés et les bateaux sont refoulés.
Ce n’est pas correct, puis en même temps on se dit qu’est-ce qui pourrait être fait par les pays pour que ces gens-là puissent venir vivre et être assez bien chez eux pour avoir le goût d’y rester aussi? Parce que pour les migrants ce n’est pas toujours évident d’arriver dans d’autres pays, ça les sort d’une certaine situation de guerre ou d’exploitation, mais ce n’est pas toujours évident par la suite.

Sr Jeanne Lemire, FSP. Crédit photo : Filles de St-Paul
Autant on a une responsabilité soit en se renseignant soit en prenant partie pour eux, c’est difficile d’arriver à des actions qui vont promouvoir vraiment un changement.
Il y a plus d’ouverture face aux groupes qui demandent l’asile, mais on est dans une situation de tiraillement. On ne peut pas aider tout le monde non plus.
Dans nos milieux, il y a des situations sur lesquelles il faut qu’on discerne là-dessus parce que ce n’est pas parce qu’on a un certain nombre de migrants que ça va aller mal chez nous. Je ne suis pas capable de croire ça, parce que ces gens-là quand ils arrivent, ils sont capables et ils travaillent aussi à la promotion de notre pays.
Ce qui pourrait être fait aussi dans nos pays, selon moi, en termes de changement, c’est que la réponse aux demandes des dossiers de ceux qui demandent soit l’asile, soit d’être acceptés comme personnes dans le pays pourrait être accélérée.
Des fois je me dis qu’on dirait qu’on se fait exprès pour qu’ils se découragent comme si on disait « ils vont être assez écœurés et ils vont laisser tomber ».
Mais ce n’est pas normal, on est en train de blesser encore davantage des personnes qui sont vulnérables.
A moins qu’on ait de l’information tout croche, il me semble que nos entrepreneurs ici en demandent aussi de la main-d’œuvre, puis qu’il y a des lois qui sont en train de réviser pour réduire les migrants sous prétexte qu’on a plus de chômeurs. Mais il y a des migrants qui répondent à des besoins bien concrets aussi chez nous.
SJR Canada : Que diriez-vous à ceux qui s’opposent à cette cause ?
Sœur Jeanne Lemire, FSP :
Je crois beaucoup que c’est une valeur ajoutée dans les pays qui reçoivent des migrants parce qu’ils sont prêts à s’impliquer. On ne parle pas ici de profiteurs, on parle de gens qui sont prêts à faire des démarches pour apprendre la langue, connaître la culture et qui veulent améliorer leur sort. Je pense qu’on ne peut pas être aveugle face à ça. Quand on regarde l’Évangile, ça devient engageant pour les chrétiens tout en faisant du discernement.
SJR Canada : Quels encouragements avez-vous pour les donateurs (ou d’autres communautés religieuses) qui ne savent pas s’ils ou elles devraient nous soutenir cette année ?
Sœur Jeanne Lemire, FSP :
Il faut être prêt à encourager ceux qui peuvent le faire. Je pense que des communautés religieuses, il y en a plusieurs quand même qui font des gros efforts pour venir en aide.
Il faut essayer de se renseigner le plus qu’on peut, et de chercher notre source d’informations à différents niveaux. Ce n’est pas parce qu’un parti politique dit qu’il ne faut pas continuer qu’il faut endosser ça les yeux fermés.
Quand on fait une référence directe à la parole de Dieu de l’Évangile, si on arrive à entrer en conversation comme le Synode nous invite à le faire, il me semble qu’on va être porté aussi aller de l’avant.
Ce n’est pas à négliger, les dons ou la participation qu’on peut faire. Quand on a l’occasion, il faut être capable de dire ce qu’on pense et être capable de dire qu’on ne peut pas laisser tomber cette cause.
